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Les battements de mon coeur

19 mars 2023

Atelier d'écriture n° 88 ( Faux semblant )

Source: Externe

Ce texte est ma participation à l'atelier d'écriture de Bric à book inspiré d'une photo de Fred Hedin.

 

Le mot BOUCHERIE s'impose au regard, simple, net, sans fioriture. Il annonce sans ambiguité la couleur. Dans cette officine, sur les étals, vous trouverez rôtis, filets mignons, paupiettes, escalopes, et rognons et derrière le comptoir en marbre, affairés, des hommes ceints de grand tablier, toujours blanc en début de journée, armés de leurs couteaux bien aiguisés.

Et pourtant, sur cette photo, les rideaux dissimulant la vitrine laissent transparaître une autre réalité, bien plus difficile à identifier : commerce réhabilité en habitation ou, jouant de l'ironie entre l'enseigne et le lieu, un restaurant vegan célèbre pour son burger au steack de tofu.

Poussons plus loin la réflexion, interrogeons-nous sur tous les lieux où devrait s'inscrire ce mot BOUCHERIE et qui en portent de bien plus flatteurs.

Quand le panier "anti- inflation" des grandes surfaces déborde de produits bas de gamme, saturés de gras et de sucre. Ces commerces ne ressemblent-ils pas à des élevages de canards pour que défilent dans les hôpitaux des oiseaux, non pas des oiseaux mais des hommes, des femmes et depuis peu des enfants au foie hypertrophié. COUP DE POUCE ECONOMIQUE ou BOUCHERIE ?

Quand au sein de votre service, votre supérieur hiérarchique a pour mission de "vous déconstruire" pour vous "reconstruire" et vous faire rentrer dans la case qu'il vous a assignée.  Ses mots sont des scalpels à l'oeuvre dans votre cerveau. MANAGEMENT BRUTAL ou BOUCHERIE ?

Quand un homme s'arroge le droit de vous mettre la main aux fesses pour tâter la marchandise, il vous transforme en morceau de bidoche. Et si la viande est à son goût, il la veut tendre à souhait. SEDUCTION VIRILE OU BOUCHERIE ?

Au fronton de nombreux bâtiments officiels, les mots EGALITE, FRATERNITE, LIBERTE. Ils sont beaux, vibrants d'humanité. Ayons le courage de dessiller les yeux, d'écarter les rideaux de cette "enseigne" et de découvrir en quoi ils sont transformés dans les officines de ceux qui détiennent le pouvoir.

 

 

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4 février 2023

Atelier d'écriture n°87 (Le ara et la mésange)

Source: Externe

Ce texte est ma participation à l'atelier d'écriture Bric à Book. Il s'inspire d'une photo de Fred Hedin.

 

 

Toute la semaine, je n'attends que ce moment, celui où je prétexterai une envie de fumer pour l'entraîner au-dehors, loin des conversations que l'alcool hystérise et de la chaleur des corps mêlés sur la minuscule piste de danse. Elle, toujours bonne copine, m'accompagne volontiers, contente de respirer quelques goulées d'air frais. À chaque fois, son geste pour rabattre le col de son manteau blanc me fait battre le cœur. Ce cou qu'elle protège, moi, je voudrais l'embrasser.

 

Avant de rejoindre la bande aux "Fleurs du malt" le samedi soir, je passe mon après-midi à choisir ma tenue. Les vêtements s'amoncellent sur mon lit. Rien de ce que je porte d'ordinaire ne convient. Je le sais, sans vouloir encore l'admettre, que ces essais rageurs vidant mes placards et faisant perler la sueur à mon front sont vains. À côté de la table de chevet brille de son éclat prometteur le sac contenant mes achats du matin.

 

Depuis la rentrée universitaire, je passe mon samedi matin à fureter dans les rayons vêtements de toutes les grandes enseignes. Je cherche à dénicher une tenue dans l'esprit de celle qu'elle portait à la dernière soirée, top noir, pantalon blanc palazzo et baskets à talons compensés, couleur lamée. Ce n'est pas du tout mon style. Dans la bande, ça rit sous cape de ma soudaine bouffée de féminité. J'ai envie de lui montrer qu'on se ressemble, et qui se ressemble s'assemble. Ce soir, j'ai même tenté le tout pour le tout, une queue de cheval haute et des créoles dorées. Vêtue de mon habit de lumière, je pensais lui dire ce soir ce que je ressentais pour elle.

 

Les mots sont restés coincés dans ma gorge. Déjà, elle portait des vêtements beaucoup moins clinquants que la semaine dernière. Je me sentais comme un ara aux couleurs criardes face à une délicate mésange. Et puis, au moment où j'allais me lancer, m'élancer, forte d'un cocktail fait d'espoir et d'effroi, elle m'a demandé, tout en exhalant la fumée de sa cigarette si je n'avais pas le 06 de Damien. Figée, la bouche ouverte par la surprise, il m'a semblé que mon cœur, pendant une fraction de seconde, s'était arrêté de battre.

 

28 janvier 2023

Atelier d'écriture n° 86 (Anne, ma sœur Anne)

 

Source: Externe

 Ce texte est ma participation à l'atelier du blog Bric à book. Il est inspiré d'une photo de Fred Hedin.

Enfant, la nuit l'effrayait. Elle ne pouvait s'endormir sans avoir vérifié que toutes les portes de la maison étaient fermées, transformant celle-ci en forteresse contre l'obscurité. Cette frayeur, liée à une trop grande sensibilité selon ses parents, n'était conjurée que par des rituels magiques de son invention : lit bordé extrêmement serré, pied gauche lové dans le creux du genou de façon que ses jambes forment le P de protection, couette remontée jusqu'au bout du nez. Même ainsi barricadée contre le noir, elle ne sombrait que d'un oeil dans le sommeil.

Pour l'endurcir, son père s'était fait le héraut de soigner le mal par le mal. L'hiver, il la chargeait d'aller chercher le bois pour la cheminée dans le fond du jardin. Il attendait toujours que les ténèbres aient envahi les alentours pour s'apercevoir que le panier de bûches était vide. L'enfant n'était pas dupe, mais savait qu'il ne servait à rien de contester la parole paternelle. Ce temps perdu en arguties ne faisait que retarder le moment de quitter la maison et de plonger, le coeur affolé, dans la nuit. Elle avançait à tâtons, les sens en éveil, attentive au moindre craquement "Ce n'est que le vent qui s'amuse à jouer des castagnettes avec les branches du peuplier !", inquiète au moindre frôlement contre ses jambes "Ce n'est qu'une renarde qui flaire sur mon pantalon l'odeur des crêpes de Maman !". Au retour de son expédition nocturne, elle faisait une pause dans la lumière retrouvée du garage. Avant d'affronter le regard de son père, elle attendait que son souffle s'apaise. Elle se composait un visage impassible pour ne pas essuyer les sempiternelles remarques sur sa "trouillardise".

A présent, la nuit est son refuge. Quand tout un chacun est claquemuré derrières ses volets clos, elle marche dans les rues désertes et à chaque pas, sa respiration s'apaise. Dès que son compagnon est endormi, elle se relève avec mille précautions, enfile rapidement les vêtements déjà préparés dans la salle de bain et quitte leur appartement. Au-dehors le silence l'accueille. A l'intérieur, elle laisse, comme des oripeaux dont on se débarrasse, les cris qui ont émaillé la journée.

Le noir n'est jamais complet en ville. Elle avance tranquillement, guidée par la lumière des lampadaires comme autant de cailloux blancs. L'obscurité lui est devenue familière, la nuit accueille ses confidences avec la discrétion d'une amie fidèle. L'appartement jamais suffisamment bien rangé, les repas trop insipides ou trop épicés, sa tête de presque quinquagénaire triste à pleurer "Si j'avais l'argent, je te paierai un lifting !", les coups qui pleuvent sur son corps, exutoire de toutes les frustrations. Elle marche et lui reviennent en mémoire les paroles du conte Barbe bleue. "Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir ?"

 

 

14 janvier 2023

Pas perdue ( Atelier d'écriture n° 85)

Source: Externe

Retrouvez les textes des autres participants sur le blog d'Alexandra pour découvrir ce que cette photo leur aura inspiré.

 

 Pas perdue

La lumière tombe des vitraux et donne au hall de gare des allures de cathédrale. On pourrait presque s’y tromper sans la présence des panneaux annonçant l’arrivée et le départ des trains. Je suis encore trop loin pour y lire ma destination. Je ne suis d’ailleurs pas si pressée de chercher et de retrouver le nom de ma ville natale.

Il était enfoui dans un recoin noir de mon esprit. À mon arrivée à Crozon, si quelqu’un m’interrogeait sur mes origines, je le crachais comme on crache un fruit pourri. Avec le temps, plus personne ne me pose la question. Je fais dorénavant partie du paysage, de ce coin de terre sauvage, à la beauté rude, qui ne s’offre pas au premier regard.

Tout à l’heure, j’ai retourné la pancarte du côté « Fermé pour congés ». Sur la porte vitrée de mon atelier de céramique, elle affiche mon absence inattendue en ce mois de novembre. Je quitte mon refuge pour marcher à rebours, remonter le temps et rejoindre la maison dont j’ai claqué la porte il y a 18 ans.

Mon petit bagage à la main, je n’ai pas prévu de m’attarder sur place, je m’approche des panneaux. Mon train est annoncé dans 6 minutes voie 2. Je reste plantée là, pétrifiée par le nom de ce lieu que mon corps, encore plus que ma raison, regimbe à regagner.

Là-bas m’attend mon frère. Il m’a prévenue de le retrouver au funérarium. Il se charge d’accueillir les quelques personnes venues rendre visite à mon père.

De lui ne me reviennent que les derniers mots qu’il m’a jeté à la figure, ses joues violacées et sa bouche déformée par la fureur : « Fille perdue ! »

Dans cette salle des pas perdus, je me souviens de la douceur de la peau de Sylvain et de l’ardeur de nos 17 ans. Depuis cet été enfiévré, nous nous sommes assagis. La mer d’Iroise a boucané son visage d’angelot. Pierre, notre aîné, veut devenir pêcheur comme lui. J’aime le sel sur ses joues encore rondes quand il rentre d’une sortie en mer avec son père.

Dans ma tête trottent ces deux mots « Fille perdue ! ». Dans la salle des pas perdus, au-delà de la mort, je voudrais lui répondre avec l’aplomb donné par les ans. « Pas perdue ! Éperdue d’un bonheur qui s’est construit dans l’adversité, sur une presqu’île battue par les vents, loin, très loin de Perpignan ».

 

 

7 janvier 2023

Atelier d'écriture n° 84

 

Source: Externe

 

Quel plaisir de renouer avec l'atelier d'écriture d'Alexandra K ! Ce texte s'inspire d'une photo de Yerson Retamal.



Mes solitudes heureuses

 

Mes mains sagement posées sur le livre dont je viens de tourner la dernière page, ma jupe et mon blazer vert, uniforme de la vieille femme que je suis devenue ne révèlent en rien les dernières heures écoulées. Bien loin du salon où l’odeur d’encaustique ne dissimule pas vraiment celle de l’humidité imprégnant les murs, j’étais au côté d’Alexandra David-Néel sur le chemin de Lhassa.

Ce soir, dans mon journal intime, baromètre de mes humeurs, je consignerai cet après-midi volé au quotidien. D’ordinaire, le mardi, j’assiste à une conférence de l’Université avec mes amies du Club Lecture. L’intervenant ayant manqué son train, s’est offerte à moi une plage horaire inattendue, un moment de solitude heureuse.

Femme et épouse accomplie, mère de famille exemplaire, je suis, au dire de tous, l’incarnation de la vertu. S’ils savaient comme cette vertu m’oppresse, corset trop étroit, image d’Epinal. Au fil des décennies, j’ai trouvé un moyen de m’évader sans que quiconque le soupçonne. Ces escapades se déroulent même sous les yeux de mes proches qui n’y voient que du feu.

Par la fenêtre de la cuisine, j’observe le pic vert, devenu un familier de notre jardin. Posé près du massif d’azalées, ce petit marteau-piqueur s’acharne sur une touffe d’herbes, cachette de vers de terre auxquels il ne laissera pas la moindre chance. Dans mon dos, j’entends que ça se chamaille. Tant que le volume sonore reste raisonnable, je ne me retourne pas pour jouer les gendarmes.

Sur le ferry qui nous amène à Cork, accoudée au bastingage, je ferme les yeux pour mieux sentir sur mes visage les embruns salés. Le vent souffle fort et j’entends les paquets de mer qui s’abattent sur le bateau, claques violentes mais indolores. Dans mon dos, Barnabé me répète que je suis folle de m’exposer ainsi. Tant que son ton ne devient pas impérieux, je ne me retourne pas pour lui répondre « Tu as raison, mon chéri, il est plus prudent de se mettre à l’abri. »

Dans le salon de thé où le Club de lecture a ses quartiers, j’écoute d’une oreille distraite la conversation mollassonne de mes amies sur le roman choisi. Je jette un regard alentour et mes yeux se posent sur le service à thé, exposé dans une vitrine derrière le comptoir. Sa porcelaine presque translucide et la scène représentée signent son origine asiatique. Je me perds dans le vert acidulé des bambous et le rose vif des robes. Tant que personne ne me demande mon avis sur le livre du mois, je ne réintègre pas la ronde des bavardages, des lieux communs et des derniers potins.

Au sein même de la société, je suis devenue une Houdini de la pensée. Vous m’imaginez, là, à vos côtés, alors que je suis partie, à l’abri, dans le continent secret de mes solitudes heureuses.

 

 

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9 janvier 2020

Johannesbourg de Fiona Melrose

Source: Externe

Fiona Melrose a choisi de nous présenter sa ville natale le temps d'une journée très particulière, le 6 décembre 2013, date de la mort de Nelson Mandela. Cette nouvelle connue par le bouche à oreille, relayée ensuite inlassablement par les médias est comme un caillou jeté dans l'eau. L'auteure ne s'intéresse pas tant à ce caillou, puisqu'aucune information précise n'est encore communiquée par la famille du défunt . Elle se concentre sur les cercles concentriques créés par ce caillou, sur la manière dont ce décès impacte les habitants de la ville, qu'ils soient blancs ou noirs.Nul ne peut rester totalement indifférent à la mort de ce leader charismatique, mais l'effet produit diffère selon les personnes. Deux personnages sortent du lot, deux presque quarantenaires, une femme blanche, Gin, et un homme noir, September.

Gin Brandt a quitté New-York et est revenue à Johannesburg pour fêter les 80 ans de sa mère Neve. Les deux femmes, descendantes d'Afrikaners, accueillent tout d'abord cette nouvelle avec un certain détachement, plus préoccupées par leur relation faite de non-dits et de souffrances mutuelles que par ce qui se passe en dehors de leur maison, ceinte de murs protecteurs. Gin, à la sensibilité à fleur de peau, artiste aux installations étonnantes, semble toujours sur le point de s'effondrer, dans un pas de deux permanent entre l'envie de vivre et celle de mourir, éternelle pré-adolescente refusant de devenir une femme.Uniquement centrée sur elle et sur sa soif d'amour maternel, elle ne voit de l'Afrique du Sud que ce qui blesse, ce qui heurte, ce qui choque. Et si le 6 décembre 2013 lui ouvrait les yeux sur le monde extérieur ? Et si la belle quittait sa haute tour pour se mêler à la foule qui se dirige vers la dernière demeure de Nelson Mandela ? Il est peut-être temps pour elle de se confronter au réel.

Au même moment, September, ancien cuisinier dans une mine appartenant à la société Diamond, blessé par balle un an auparavant quand des miliciens ont tiré sur les mineurs grévistes dont il faisait partie, perd peu à peu la raison. La tête ornée d'une couronne d'agapanthes, vêtu de haillons, il veut que justice soit faite et que les dirigeants de Diamond reconnaissent que l'ordre de tirer est venu de l'un d'eux. Quand il ne mendie pas sur un rond-point de la ville, exhibant sa bosse pour susciter la pitié et lui permettre d'obtenir les quelques pièces nécessaires à sa survie dans la rue, il se plante devant l'immeuble de la société minière, décidé à obtenir la vérité. Son esprit l'abandonne de plus en plus et retourne sur les terres de son enfance, au temps où son dos était encore droit et sa fierté d'être noir intacte. Et si malgré son corps si faible et sa tête si douloureuse, il redevenait guerrier, pourfendeur d'injustices ? Un guerrier certes, mais avec l'amour comme seul bouclier en digne émule de Nelson Mandela ...

Gin et September vont se croiser pendant cette journée grâce à Juno, la petite chienne de Neve. L'animal, profitant d'un moment d'inattention, a franchi le portail de la propriété et s'est égarée dans son quartier. September va la recueillir et la ramener à Gin. Fiona Melrose ne tombe pas dans la facilité d'une rencontre entre les deux personnages qui se solderait par un happy end, une réconciliation de la blanche et du noir autour d'un évènement heureux. Leur rencontre n'en est même pas une, chacun terriblement enfermé dans sa propre bulle de souffrance.

Autour de ces deux personnages-pivots gravitent leur famille, leurs amis, leur patron. Ceux-ci font entendre leurs voix et à travers elles se dessine la Johannesburg de 2013, fascinante et dangereuse, toujours profondément inégalitaire et pourtant unie dans un amour commun de ce lieu où fleurissent les agapanthes.

Un très beau roman, au style et à la construction maîtrisés, une description de Johannesburg, vue comme une fleur aux multiples couleurs résistant depuis la nuit des temps aux plus âpres des vents.

 

1 décembre 2019

L'encyclo à malices NATURE de Hélène & Robert Pince

Source: Externe

 

Reçue lors de la dernière opération Masse Critique Jeunesse, cette encyclopédie trouvera sa place dans la classe de l'une de mes filles, professeur des écoles. Dans sa bibliothèque, c'est un livre qui peut plaire à tous les élèves. Sept grands chapitres nous présentent différents univers comme les montagnes et vallées, les villes et jardins ou encore les mers et rivages. Chaque page accueille une série d'encadrés indépendant les uns des autres. L'enfant, petit ou grand lecteur, y trouvera des informations sur la faune et la flore, des recettes de cuisine, des expériences scientifiques à réaliser pour mieux comprendre certains phénomènes naturels, des idées aussi de bricolage comme de réaliser des animaux avec des glands et des allumettes ou un crabe sauteur avec un bouchon et une plume de mouette.
Ces encadrés sont toujours pertinents : instructifs, mais en phase avec les centres d'intérêt des plus jeunes. Un dico des crottes et un autre des empreintes permettent de reconnaître les animaux de manière "ludique". De courts textes sur les marmottes et leur embonpoint hivernal ou sur la belette naine ne pesant que 30 grammes sont susceptibles de passionner un public avide de ce genre de renseignements.
Les illustrations ont beaucoup de charme, un côté un peu vintage que j'ai beaucoup apprécié. Les tutos des expériences ou des recettes sont à la fois simples et bien détaillés. Toutefois, la plupart nécessitent l'aide d'un adulte, enseignant, parent ou grand-parent.
Cette encyclopédie pourrait d'ailleurs constituer un très joli cadeau pour des grands-parents soucieux de partager avec leurs petits enfants la confection de confiture de mûres, la réalisation d'un tableau en sable coloré ou d'un sifflet d'écorce, si précieux en randonnée.
Ce livre nous rappelle l'importance de vivre en harmonie avec notre milieu naturel. Et pour cela, rien de tel que de le connaître !

 

12 novembre 2019

Nos promesses sont éternelles de Camilles Challes

Source: Externe

Lu en quelques heures, ce roman de Camilles Challes raconte le "pétage de plomb" de Justine, une femme très révélatrice de notre société comptemporaine. Notre héroïne se persuade que la fête surprise organisée par son mari pour ses quarante ans et le blender offert à cette occasion sont les éléments déclencheurs de sa crise existencielle. Elle ne se reconnaît pas dans cette "wonderwoman", le blender dans une main pour être la mère parfaite des post Instagram #family et l'iphone dans l'autre pour gérer à distance ses rendez-vous professionnels et coller cette fois-ci avec des posts #workinggirl. Coincée dans son rôle de mère idéale sur laquelle tout le monde compte, épuisée par son rôle d'employée modèle acceptant avec le sourire des dossiers de plus en plus lourds et des deadlines quasi-intenables, en plein doute sur sa relation avec Maxime, son deuxième mari, Justine se dit que son "moi" d'il y a vingt ans, cette élève de Terminale qui pensait que tout était possible, qu'aucun chemin n'était tracé d'avance ne serait pas fière de ce qu'elle est devenue.

Sur les conseils de son amie Claire, une célibattante, elle prend une semaine de RTT et se lance sur les traces de sa bande de copains de Terminale. Ont-ils mieux réussi qu'elle à composer avec l'âge adulte ? Ont-ils réalisé tous les projets qui leur tenaient à coeur à 18 ans ? Justine espère que ce retour dans les années 90 lui permettra de trouver des réponses à son mal-être et de se recentrer sur l'essentiel. Commence alors un road-trip contemporain, piloté à distance par Claire, qui constitue des dossiers sur tous les amis que Justine veut retrouver, lui arrange des rendez-vous avec ceux-ci et va jusqu'à lui réserver tous ses billets de train. On est assez loin de Jack Kerouac :-).

Le lecteur suit avec plaisir Justine dans ses tribulations, il renoue lui aussi avec sa jeunesse, ce temps d'avant les réseaux sociaux. Son exploration ne ramène pas seulement notre personnage principal au temps du lycée, mais bien avant, quand son univers se limitait à ses parents, sa soeur et leur petite vie tranquille dans un quartier résidentiel d'une ville moyenne. Le charme de ce livre est aussi de nous remettre en tête la bande son de l'époque, de nous faire sentir à nouveau le goût chimique du Tang et de nous permettre de revivre les amours adolescentes oscillant entre inquiétude, maladresse et serment de s'aimer toujours ( ou du moins jusqu'aux vacances prochaines).

La plume de Camilles Challes est aussi joliment affûtée sur notre société du paraître et des modes qui disparaissent avant même de s'installer. Certains passages, en particulier sur les réseaux sociaux, sont particulièrement bien vus.

Ma seule réserve concerne les "personnages", sans doute fruits de l'imagination de Justine, qui la guident sur cette route à rebours. Sans doute sont-ils là pour nous avertir que Justine a rendez-vous, au bout du chemin, avec le fantôme d'un être aimé ? Personnellement, je les ai trouvés superflus et même caricaturaux, surtout la diseuse de bonne aventure.

Merci à Camilles Challes pour cette plongée dans les années lycée, celles où les papillons sortent de leur chrysalyde et s'envolent pour les plus solides vers un futur qu'ils imaginent merveilleux. Merci aussi de situer la fin du chemin de Justine en Finistère, à la fin de la terre, sur la plage de la Palue. Rien de pouvait faire plus plaisir à la Bretonne que je suis.

Merci à Slavka, attachée de presse des éditions City, pour l'envoi de ce SP.

3 novembre 2019

Une autobiographie d'Agatha Christie

Source: Externe

 

La lecture de cette autobiographie aura été un véritable bonheur, me permettant de découvrir une étonnante personnalité au caractère bien différent de celui que j'avais prêté à "la reine du crime". Enfant rêveuse, d'une grande timidité, elle souffrira toute sa vie quand il lui faudra sacrifier aux mondanités ou, comble de l'horreur, s'exprimer en public. Pour raconter sa vie, elle choisira donc assez naturellement de l'écrire, prévenant tout de suite le lecteur que son ouvrage, hormis l'aspect chronologique, ne sera pas forcément un modèle d'autobiographie. Elle y travaille de temps en temps, trouvant plaisir à se remémorer des épisodes marquants de sa vie. Comme il ne s'agit pas d'une commande, et qu'elle l'écrit à un moment de son existence où elle n'a plus besoin de publier pour subvenir à ses besoins, la rédaction s'étale sur des dizaines d'années et n'obéit pas à un schéma strict. Les souvenirs nous parviennent comme ils affleurent à sa conscience, et certains, particulièrement marquants, reviennent plusieurs fois dans son récit.
Un biographe se penchant sur le destin incroyable de cette femme contextualiserait à coup sûr tous les événements, avec force détails historiques. Agatha Christie se libère de ces contingences, ne balisant sa vie que de quelques dates clés et la scindant ensuite en grandes parties (qu'elle nomme chapitres) pour aller de ses premiers souvenirs d'enfant à ses soixante-quinze ans. Née en 1890 dans un milieu aisé, petite dernière choyée, son éducation se fera au gré des toquades de sa mère et des ennuis d'argent dus à de mauvais placements paternels. Elle apprend à lire toute seule, acquiert quelques notions de mathématique auprès de son père et complétera ensuite sa "formation" dans des écoles privées en France et en Angleterre. Ce parcours "scolaire" peut choquer de nos jours. A l'époque, c'était la "norme" dans leur milieu, une jeune fille devait en savoir juste assez pour "harponner" un prétendant. Très attachée à ses parents, elle ne les voit pourtant que peu. Son univers se limite à la nursery et au jardin, et son quotidien est assuré par une série de nounous qui la marqueront plus ou moins. Ses frère et sœur étant en pension, elle meuble sa solitude en s'inventant des mondes, le premier a pour habitant des "Chatons", les suivants des enfants auxquels il arrive de nombreuses aventures. Sa propension à la rêverie et sa capacité à se suffire à elle même laissent déjà deviner avec quelle facilité elle se glissera dans la peau d'un écrivain.
Agatha Christie porte sur ses premières années un regard amusé, nous dévoilant les us et coutumes d'une époque victorienne jetant ses derniers feux. Paz de critique au vitriol de son milieu, simplement une description détaillée de ses journées. Elle se tiendra à cette relative neutralité pour toutes les périodes de son existence. Agatha Christie n'a pas l'âme d'une suffragette et si elle agit de façon non conformiste, ce n'est jamais avec la volonté de changer le sort des femmes ou de faire évoluer la société. Autre caractéristique de son récit une pudeur que d'aucuns qualifieront de britannique, qui l'incite à ne mettre en avant que le meilleur, éludant ou rappelant seulement par quelques mots les moments les plus durs de son existence.
Agatha Christie le répète souvent, l'écriture n'occupera pas une place centrale dans sa vie. Cette "activité" pour laquelle elle a des facilités lui apparaît au début comme un passe-temps, puis après comme un moyen très simple de se procurer de l'argent par exemple pour acheter une voiture ou une nouvelle maison. Jusqu'au bout, le titre d'écrivain lui paraîtra usurpé. Elle n'a pas le sentiment d'être légitime et continuera longtemps à se présenter comme une femme au foyer. L'écriture de ses romans n'est que la prolongation des histoires qu'elle inventait avec ses Chatons. Elle aime "entrer en rêverie", imaginer des personnages et une intrigue qui plairont à ses lecteurs. La naissance d'Hercule Poirot est un véritable régal à lire, que je vous invite à découvrir.
Les voyages, en revanche, seront au cœur de son existence. Elle découvrira par exemple Bagdad dans les années trente au cours d'un périple qu'elle entreprendra seule, ce dépaysement devant lui permettre d'oublier le chagrin de son divorce. Elle, si "empotée" lors des soirées, affrontera les aléas du voyage avec un flegme sidérant. C'est ce qui séduira séduire Max Mallowan, jeune archéologue de quatorze ans son cadet. Leur mariage, contrairement aux prédictions de certains grincheux sera des plus heureux, Agatha l'accompagnant et l'assistant lors de ses nombreuses missions au Moyen-Orient.
Cette autobiographie, dense et parfois brouillonne, nous donne à voir une rêveuse paradoxalement douée pour l'action, une femme dotée d'un formidable appétit de vivre et d'une indéfectible espérance dans le devenir de l'homme. Quand on compare la situation de la Syrie ou de l'Irak au moment où elle y séjourne avec celle d'aujourd'hui, il est difficile de partager son optimisme sur la nature humaine.
Quand j'ai refermé ce livre, le sourire aux lèvres, j'ai imaginé une dernière fois Agatha Christie à Honolulu dans les années 20, sur sa planche de surf et attendant avec impatience la "bonne" vague. Une image bien loin de la vieille dame anglaise aux tailleurs de tweed et à la permanente frisottée.

                                                          Une lecture coup de cœur !

Lu en numérique via Netgalley

 

30 octobre 2019

La Fabrique de Poupées d'Elisabeth Mc Neal

Source: Externe

 

La lecture de "La fabrique des poupées" a suivi de très près ma visite de l'exposition " Cabinets de curiosités" aux Fonds Hélène et Michel Leclerc à Landerneau. Après avoir vu des animaux empaillés, je les ai retrouvés dans la boutique de Silas Reed, un des personnages clés du roman d'Elizabeth McNeal. Taxidermiste de son état, il excelle dans sa pratique et ses "créatures" gardent tellement l'apparence de la vie qu'elles séduisent un groupe de peintres, les préraphaélites, dont Louis Frost qui lui achète une colombe qui lui servira de modèle pour un tableau. Ce " Louis Frost", purement fictif, nous permet de découvrir l'émergence de cette tendance picturale car ses compagnons d'aventure, dont le célèbre Millais et son tableau représentant l'Ophélie de Shakespeare, ont eux bien existé.
En parallèle, dans une boutique de poupées, deux soeurs jumelles de 21 ans, triment du matin au soir pour peindre et habiller les jouets destinés aux fillettes de bonne famille. Rose, défigurée par la variole, n'est plus depuis sa maladie la plus jolie des deux. Iris, et sa déformation de la clavicule n'est plus perçue, elle, comme "l'handicapée" de la famille, mais comme une jeune femme à la beauté éthérée et aux cheveux d'un roux flamboyant. Leur couple fusionnel durant l'enfance ne tient plus que par leur sort commun : perdre leur jeunesse à exercer un métier routinier et partager le repas du dimanche avec des parents prompts à récupérer le salaire de leurs filles.
Iris est prête à s'envoler, à quitter ce magasin qu'elle considère comme une prison. Rose, quant à elle, considère l'endroit comme un refuge où dissimuler sa peau grêlée et son oeil mort.
Alby, garçonnet à la Gavroche, va être le lien entre ces différents univers. Il chasse des animaux pour Silas et coud des vêtements de poupées pour la patronne des jumelles. Sans le vouloir, il va mettre en relation Iris à la fois avec Silas et Louis Frost. Traquée par l'un, accueillie par l'autre, la beauté d'Iris les subjugue pour des raisons différentes et le roman prend alors deux chemins distincts, ce qui m'a déroutée : un récit assez classique à la Dickens et un thriller façon Hannibal Lecter. Ce mélange des genres fait du roman un objet hybride, intéressant, mais qui m'a mise mal à l'aise. Je ne lis pas de thrillers, je ne supporte pas la violence "scénarisée", pas plus que je ne la supporte dans la vraie vie. Mon avis est donc mitigé sur ce roman. J'ai apprécié la description du groupe des préraphaélites et l'émancipation d'Iris grâce à la peinture, le Londres de 1850 et la préparation de l'Exposition Universelle. En revanche, l'aspect thriller a failli me faire abandonner ma lecture.

 

Lu en numérique via Netgalley

 

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