Fan de Downton Abbey ?

24 mars 2015

Source: Externe

Si vous aimez comme moi la série anglaise Dowton Abbey, vous devriez apprécier ce livre qui a inspiré son scénariste. Le titre français ne me plaît que modérément, je lui préfère l'original Below Stairs ( qui désigne l'office en bas des escaliers). Le sous-sol, c'est effectivement l'antre des cuisinières, leur domaine, où seule la maîtresse de maison peut entrer pour discuter des menus de la semaine. Margaret Powell, entre "en conditions" à l'âge de quatorze ans dans les années 1920 car ses parents sont trop pauvres pour lui permettre d'aller au collège. Adieu le rêve de devenir institutrice, elle va démarrer en bas de l'échelle de la domesticité comme fille de cuisine.

La hiérarchie est aussi rigide en bas qu'en haut où "Eux" comme les désigne l'auteur mène la belle vie : confort, nourriture abondante et de qualité, le moindre désir exaucé à peine prononcé. Pour leur assurer cette existence "parfaite", il leur faut une armée de petites fourmis discrètes qui travaillent du soir au matin, sans exprimer la moindre récrimination. A ses débuts, Margaret doit non seulement servir les maîtres mais aussi les autres membres du personnel. Son tempérament optimiste et sa volonté lui permettent de grimper dans la hiérarchie et de place en place, elle se hisse au rang de cuisinière.

Ce roman, paru pour la première fois en 1968, décrit une époque déjà révolue alors : les liens entre les serviteurs et leurs maîtres sont un étrange mélange de servitude féodale et de mimétisme inconscient. Certains domestiques confondent presque leur vie avec celle du "Lord Tartempion" qu'ils servent. L'auteur décrit avec beaucoup de détails réalistes son quotidien : du repassage des lacets pour les chaussures de ces "dames" dans la première place qu'elle occupe aux soufflés devenus sa spécialité en tant que cuisinière chevronnée. A la fin de son livre, Margaret Powell se reproche d'avoir été trop amère dans son récit des années passées "en conditions". Je ne la trouve jamais dure, ni cynique alors que ses conditions de vie sont parfois indignes. Dans un langage souvent "coloré", elle nous montre le fonctionnement des riches maisonnées au début du XXème siècle, les relations entre ceux du bas et ceux du haut et son indéfectible courage est tout à son honneur.

Mariée, elle quittera son emploi de cuisinière pour devenir femme au foyer. Ses enfants élevés, elle reprendra ses études et l'obtention du baccalauréat sera comme un pied de nez à ses employeurs passés qui ne pouvaient concevoir qu'une domestique puisse lire autre chose que les magazines féminins...

Une lecture roborative !

Petit extrait :

"Même Lady Downhall était un peu comme ça. Je lui ai demandé un jour si je pouvais emprunter un livre de sa bibliothèque, et je vois encore son air étonné. Elle m'a répondu:

- Oui, bien sûr, Margaret.

Mais elle a ajouté:

- A vrai dire, je ne savais pas que vous lisiez.

Ils savaient qu'on respirait, qu'on dormait et qu'on travaillait, mais qu'on lisait, ça, ils ne le savaient pas. Comme si une chose pareille dépassait l'entendement. Ils croyaient que quand on avait du temps pour nous on le passait à bayer aux corneilles ou à feuilleter des magazines féminins. Je les imaginais assez bien en train de me dénoncer à leurs amis :

- Margaret est une bonne cuisinière, mais malheureusement elle lit. Des livres, figurez-vous."

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